Eviden (groupe Atos) fabrique sur son site angevin le premier supercalculateur européen exascale : Jupiter. Un palier symbolique est franchi au sein d’un site qui représente la place forte européenne dans le combat acharné que se livrent les grandes puissances en matière de calcul informatique avancé.

Il s’appelle Jupiter et sa fabrication vient de débuter au sein du site d’Eviden (groupe Atos) à Belle-Beille.

S’il porte le nom du roi des dieux, ce n’est pas un hasard. En effet, quand il sera installé en avril 2025 au centre de recherche Jülich à Aix-la-Chapelle en Allemagne, il sera le premier supercalculateur fabriqué en Europe à dépasser la barre mythique de l’exaflop, c’est-à-dire pouvant réaliser un milliard de milliards de calculs par seconde.

L’investissement global pour une telle machine tourne autour de 500 millions d’euros. Des chiffres considérables qui donnent un aperçu de l’enjeu stratégique que constitue cette technologie.

Une puissance de calcul phénoménale

Pour se donner une idée de la progression phénoménale de la puissance informatique, il faut savoir que pour parvenir humainement à réaliser un tel calcul fait en une seule seconde par la machine, il faudrait mobiliser et connecter toute la population mondiale, soit 8 milliards d’êtres humains, pendant quatre longues années jour et nuit, donc sans dormir, et que chaque personne fasse non-stop un calcul toutes les secondes…

Les premières lames de Jupiter sont donc en cours d’assemblage. Il en faudra près de 3 000 qui prendront place dans 125 racks, sorte de grandes armoires.

Quand il sera installé en Allemagne, le tout représentera une surface d’un peu plus de 700 m², soit quatre courts de tennis.

Angers, la place forte européenne

Le site angevin d’Eviden est le numéro un européen de fabrication des supercalculateurs et le seul à peser au niveau mondial. Le supercalcul est aujourd’hui un enjeu central de souveraineté entre grandes puissances qui mettent en concurrence des géants de l’électronique pour l’essentiel basés aux Etats-Unis et en Chine.

Avec ses 250 salariés, Angers est la place forte de l’Europe dans ce combat qui s’annonce titanesque.

Nucléaire, météo, IA…

Les machines assemblées à Angers se retrouvent dans les centres de recherche les plus pointus au monde.

Il s’agit d’avoir la plus grande profondeur de calcul pour analyser au plus juste les questions atomiques ou météorologiques mais également pouvoir répondre aux demandes de plus en plus poussées en matière d’intelligence artificielle et de recherche scientifique.

Onze des cent plus puissants supercalculateurs aujourd’hui en fonctionnement dans le monde sont sortis des chaînes de production angevines et 48 sont dans le Top 500.

Deux sont même dans le Top 10 : en 6e place, Leonardo installé à Bologne en Italie pour Cineca, le consortium italien de la recherche ; en 8e place, MareNostrum installé à Barcelone pour le BSC, le centre national de calcul intensif d’Espagne.

Jupiter dans le Top 3

« A sa mise en service, Jupiter devrait monter sur le podium mondial de la puissance de calcul, se réjouit Anthony Sourice, chef de projet industriel pour sa fabrication. Cela montre notre capacité à être encore et toujours parmi les meilleurs. Notre plus-value, c’est notre réponse sur-mesure aux besoins de nos clients. Car pour construire un supercalculateur efficace, il ne suffit pas d’empiler des lames mais de bien doser la complémentarité entre leurs différents composants notamment les microprocesseurs classiques, graphiques ou d’intelligence artificielle. Notre autre atout, c’est d’offrir un système de data center modulaire permettant d’accélérer considérablement la phase d’installation chez le client. »

Un système de refroidissement performant

Autre avantage compétitif reconnu d’Eviden, son système de refroidissement. En effet, difficile d’imaginer la chaleur potentiellement dégagée par un supercalculateur qui va développer une puissance équivalente à 10 millions d’ordinateurs portables.

A lui seul, ce système de refroidissement occupe d’ailleurs près d’un tiers du volume global et donc réussir à maîtriser la température est une clé du succès.

Fabriquer simultanément quatre supercalculateurs

Pour Eviden, Jupiter représente le passage d’un nouveau palier en termes de puissance. Une avancée qui va se cumuler avec une autre, celle du doublement des capacités de production à partir du printemps 2025.

En effet, à l’issue du chantier d’extension qui est en cours (lire zoom ci-dessous), l’entreprise pourra fabriquer simultanément quatre supercalculateurs de cette dimension contre deux actuellement.

En matière de supercalculateurs exascales comme en matière de mythologie, Jupiter n’est donc à coup sûr que le premier d’une très longue lignée.

ZOOM SUR LE CHANTIER

Avec un budget de 80 millions d’euros, la transformation du site Eviden avec la construction d’une nouvelle usine au Nid-de-Pie à Angers est le plus grand chantier industriel des trente dernières années sur l’agglomération angevine.

Le choix a été fait de réaliser ce chantier sur le même site. Ceci dans un objectif de réduction d’impact environnemental. Avec la modernisation du site, la transition écologique est en effet au cœur des réflexions de tout ce chantier qui est mené à bien par l’aménageur public Alter au nom de l’entreprise.

L’opération se déroule en plusieurs étapes. La première va permettre la construction du nouveau bâtiment de production à la place d’anciens entrepôts qui ont été démolis. La mise en service de la nouvelle usine est programmée au printemps 2025.

La deuxième étape concernera l’espace logistique et l’espace bureaux/campus. L’ensemble du chantier devrait être terminé à l’horizon 2027. Pour Eviden, il s’agit de doubler la surface de production et de réaliser un gain de productivité de 30%. Côté emploi, l’embauche d’une centaine de salariés en plus des 250 actuels est envisagée à terme.

Légendes photos. Grande image : Une partie de l’équipe d’Eviden qui participe à l’aventure industrielle de la fabrication de Jupiter. Près de 80 employés du site angevin sont ainsi directement impliqués. Image portrait : Anthony Sourice, le chef de projet industriel pour la fabrication de Jupiter. Dernière image : Assemblage d’une lame.

Publié le 15 avril 2024