C’est à partir d’Angers que l’Union européenne protège la création en matière végétale. C’est la mission que remplissent depuis 27 ans l’OCVV et sa cinquantaine d’agents européens. Son président Francesco Mattina explique le rôle essentiel de cette agence.

C’est quoi l’OCVV ?

OCVV signifie Office communautaire des variétés végétales. Nous sommes une agence décentralisée de l’Union européenne. Cette agence a été créée en 1995 et est implantée à Angers depuis 1997. Sa mission est de délivrer pour les nouvelles variétés végétales une protection juridique unique au moyen d’un droit de propriété intellectuelle valable à l’échelle des 27 pays de l’Union européenne. Grâce à ce système, les créateurs de végétaux n’ont qu’un seul dossier à déposer au lieu d’un dans dans chacun des Etats membres de l’Union européenne. Nous protégeons ainsi toutes sortes de variétés dans tous les secteurs : céréales, fleurs, plantes ornementales, fruits, légumes…

Que représente l’OCVV à Angers ?

Nous sommes une cinquantaine d’agents employés par l’Union européenne. Nous avons comme particularité de représenter 14 nationalités. Parmi notre effectif, se trouve un grand nombre d’ingénieurs agronomes, de juristes et de personnel administratif. Le siège est au 3, boulevard Foch mais nous nous répartissons sur trois sites. A ce sujet, nous menons actuellement une réflexion afin de réunir l’ensemble de l’équipe au sein d’un site unique, à Angers évidemment.

Quelle est l’utilité de vos titres de protection ?

Une innovation qui répond à un besoin du marché représente une valeur financière évidente. Mais pour que cette valeur soit effective, il faut que cette innovation soit juridiquement protégée. L’absence de protection limiterait considérablement la R & D mise en œuvre au sein des entreprises du végétal et des organismes de recherche. Nos titres de protection constituent donc une importante plus-value pour leurs détenteurs. Au-delà de l’aspect purement juridique de notre mission, nous contribuons donc à l’enrichissement de la filière végétale européenne pour laquelle nous sommes un vecteur d’innovation. Je pense en particulier au développement de végétaux affichant de meilleures valeurs nutritives, plus résistants aux maladies ou mieux adaptés au changement climatique… Nous venons d’ailleurs de publier une étude qui démontre clairement la valeur ajoutée de nos titres de protection sur la croissance et les objectifs de durabilité de l’UE. (Lire la synthèse de cette étude)

Comment cela se passe-t-il concrètement ?

Les obtenteurs de nouvelles variétés nous déposent un dossier de candidature avec la description de la nouvelle variété qu’ils souhaitent protéger accompagné de semences. Nous confions alors l’examen technique à des organismes partenaires situés dans différents pays de l’Union. Il est à noter qu’une de ces structures est elle aussi angevine : le Gévès à Beaucouzé qui prend en charge l’examen de différentes espèces, notamment les variétés de pommiers.
Pour déterminer s’il s’agit bien d’une nouveauté, le protocole suit un cahier des charges très précis que nous résumons en trois lettres DHS : D pour distinction, H pour homogénéité et S pour stabilité. La variété doit afficher des caractéristiques différentes de celles référencées dans notre base de données par d’autres variétés qui sont déjà notoirement connues. Pour être en mesure de le savoir, les plantes doivent avoir atteint un certain stade de maturité. La conclusion prend donc du temps : d’un an pour des plantes ornementales à six ans pour certains arbres comme les pommiers.

Combien de végétaux protégez-vous chaque année ?

Autour de 3 500. Depuis sa création, l’OCVV a reçu plus de 76 000 demandes et délivré 60 000 titres de protection. Plus de la moitié concernent des végétaux ornementaux. La fleur qui arrive en tête des demandes, c’est la rose. Parmi les céréales, c’est le maïs. Parmi les légumes, la laitue, et, parmi les fruits, la pêche. Un titre de protection dure entre 25 et 30 ans. Par conséquent, 30 000 titres de protection sont actuellement en vigueur.

Combien coûte cette protection ?

Le dépôt de dossier coûte 450 €, l’examen technique entre 1 500 et 3 000 € par année de culture. Ensuite, le détenteur du titre de protection verse une taxe annuelle de 330 €. Tout ceci est à la charge du demandeur. Grâce à ces rentrées d’argent, nous nous autofinançons.

Et d’où viennent les demandes ?

Pour l’essentiel, ces demandes sont faites par des entreprises européennes. Les Pays-Bas, la France et l’Allemagne constituent le trio de tête des pays d’origine. Mais nous avons aussi des candidatures de sociétés américaines qui veulent protéger leurs innovations sur le sol européen, ainsi que des demandes venues de Suisse qui héberge les sièges sociaux de quelques grandes entreprises d’agroalimentaire. A ce sujet, il faut savoir que l’immense majorité des dossiers, plus de 90 %, sont déposés par des TPE et PME et non par des multinationales. Nous sommes donc un élément essentiel de défense de l’innovation au sein des petites structures.

BIO EXPRESS : Italien, Francesco Mattina est né à Naples en 1971. Il est marié et père de trois enfants. Après avoir suivi un cursus en droit, il se spécialise dans les questions liées à la propriété intellectuelle. Il commence une carrière d’avocat d’affaires avant d’intégrer en 2013 l’OCVV en tant que chef de l’unité juridique. Il en devient vice-président en 2017 puis président en février 2022.

Pour plus d’info : cpvo.europa.eu

Cet article a été rédigé dans le cadre de « 2022, année du végétal », pour en savoir plus à ce sujet, cliquez sur l’image ci-dessous:

Publié le 10 juin 2022